Montréal

“L’aide médicale au mourant, pas à mourir”: Conférence aux prêtres du Cercle sacerdotal de Montréal par Mgr Simard, de l’Académie pontificale pour la vie / Un compte-rendu par l’abbé Fernando Mignone

Un prêtre peut-il donner les sacrements à un fidèle qui, avec l’aide soi-disant “médicale”, va en fait mettre fin à ses jours? La question est posée, depuis la légalisation de l’euthanasie au Canada en 2016, qui a ouvert une boîte de Pandore de défis pastoraux. Mgr Noël Simard a essayé de clarifier ces défis devant une trentaine de prêtres lors d'une conférence organisée par le Cercle sacerdotal de Montréal au Centre Piedmont, dans le quartier d’Outremont. 

Nommé le 15 octobre par le Pape François au Conseil d’administration de l’Académie pontificale pour la vie, l’évêque de Valleyfield, Québec, est un expert en bioéthique.

Dans une première partie de la conférence il a expliqué la stratégie des activistes pro-euthanasie pour utiliser des euphémismes et une terminologie nouvelle, et ainsi plonger les gens dans le trouble. Dorénavant, l’euthanasie  est appelée “l’aide médicale à mourir”. Beaucoup de gens sont plongés dans cette confusion. Les personnes âgées et handicapées, de même que les malades en phase terminale, sont mis sous pression de mettre fin à leur vie. Et c’est pour cela, a commenté Mgr Simard, qu’il faut clarifier le langage et former les consciences, tout en faisant preuve de bienveillance et de proximité envers les personnes tentées de faire appel à l’euthanasie..

Le prêtre a un ministère de guérison spirituelle et d’accompagnement. Si la personne en fin de vie ne peut pas être guérie corporellement, il est nécessaire de prendre soin d’elle jusqu’au bout, mais non la faire disparaître. Car elle a une dignité qui demeure même lorsque survient la détérioration qui diminue la qualité de vie. La vraie compassion est l’aide médicale au mourant, et non pas “l’aide médicale à mourir” (AMM). La vraie tendresse se manifeste à travers les soins palliatifs. De nos jours, les 47 maisons de soins palliatifs au Québec sont l’objet de pressions afin qu’elles proposent l’AMM, de telle sorte que 29 parmi elles maintenant le font! Si elles n’acceptent pas, le gouvernement peut leur retirer leur subvention. Par ailleurs, l’alternative à l’acharnement thérapeutique n’est pas l’euthanasie, mais les soins de confort et le traitement de la douleur par les analgésiques comme la morphine et éventuellement la sédation palliative.

Le conférencier a mentionné que pour son 50e anniversaire d’ordination sacerdotale, le 28 mai dernier, les fidèles de son diocèse ont créé un Fonds Mgr Simard justement pour aider les mourants à domicile et leurs aidants naturels.  

Il faut donc changer la culture, il faut accompagner les personnes qui demandent l’euthanasie, pas les faire disparaître. Elles lancent souvent un cri de cœur avec la demande de l'AMM, car elles ne veulent pas être abandonnées et ont peur de vivre dans un état de souffrance intolérable. Étant donné la confusion qui existe au plan du langage, de la non-distinction entre le légal et le moral et de l’impression que c’est un soin médical, elles ne sont pas vraiment conscientes que cela revient à se suicider. 

Alors: un prêtre peut-il donner les sacrements à un fidèle qui a l'intention de mettre fin à ses jours avec l’aide médicale à mourir ? Les opinions sont partagées à cet effet mais la prudence pastorale demande qu’il est préférable de s’abstenir sinon de reporter les gestes sacramentels. Le pasteur d’âmes essayera de dialoguer avec le fidèle, et maintes fois, avec le respect de sa liberté. S’il change d’avis ou laisse entrevoir une position différente, il pourra se confesser, recevoir l’onction des malades et l’eucharistie. Quelle que soit sa décision, le pasteur l’assurera de sa prière et de sa sollicitude. Le bon pasteur pourra-t-il célébrer les funérailles d’une personne ayant eu recours à l’euthanasie? Oui, de manière générale, sauf si l’entourage veut instrumentaliser les funérailles pour en faire un argument favorable à l’euthanasie. Car les funérailles sont destinées à remettre la personne défunte à la miséricorde de Dieu et apporter soutien, réconfort et espérance à la famille et aux membres de l’assemblée.

En dialoguant avec les prêtres après sa conférence, Mgr Simard leur a conseillé des précieuses ressources épiscopales: de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec: la Lettre pastorale “Approcher de la mort avec le Christ” et le parcours de réflexion, “Les soins de fin de vie à la lumière de la Parole de Dieu”. De la Conférence des évêques catholiques du Canada: la trousse d’outils sur les soins palliatifs, “Horizons d'espérance". Des évêques belges, leur déclaration “Je te prends par la MAIN, accompagnement pastoral en fin de vie”.

(Nota bene. Voici ce que dit Wikipédia sur l’AMM.  “Au Canada, l'aide médicale à mourir est la locution (qualifiée d'ailleurs d'exercice euphémisant par certaines personnes critiques de cette pratique ou bien opposées à celle-ci) officiellement utilisée pour désigner principalement l'euthanasie… et … le suicide assisté (qui porte alors le nom particulier d'«aide médicale à mourir auto-administrée»). Bien que la notion n'était prévue à l'origine que pour les malades en phase terminale qui demandaient l'euthanasie, l’AMM est progressivement étendue à des personnes qui ne sont pas en phase terminale, y compris des personnes souffrant de troubles mentaux, dans un contexte de suicide assisté.)”

Fernando Mignone