Cher Peuple de Dieu à Montréal,

Télécharger la version PDF de la lettre pastorale

Croire en Jésus-Christ, c’est rencontrer Jésus-Christ. Le mystère de la foi est le mystère d’une rencontre personnelle et communautaire avec Jésus-Christ, Fils de Dieu fait homme, vrai Dieu et vrai homme, Crucifié et Ressuscité. Rencontrer Jésus-Christ c’est découvrir l’Amour infini de Dieu, suprêmement révélé sur la Croix, dans le Coeur transpercé d’où s’écoulent le sang et l’eau (cf. Jn 19, 34).

La Croix Glorieuse est le rayonnement de l’Amour divin vainqueur du péché, de la souffrance et de la mort. Contempler Jésus-Christ Crucifié c’est entrer dans le mystère de son Amour pour le Père éternel et de son Amour pour nous, pour l’humanité, pour tout être humain de tout lieu et de tout temps. En sa dimension verticale, la Croix relie le ciel et la terre, réconcilie la terre avec le ciel et ouvre ainsi le chemin de la rencontre entre l’être humain et Dieu. En sa dimension horizontale, la Croix embrasse toute l’humanité et ouvre ainsi des chemins de rencontre, de dialogue, de réconciliation, de paix et de communion.

Jésus lui-même nous annonce « et moi, quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes » (Jn 12,32) pour nous dire la puissance d’attraction de son Amour que rien ne peut arrêter, lui qui nous aime jusqu’à l’extrême de l’amour. On pourrait penser qu’il s’agit ici de la lumière de la Résurrection, mais l’évangile nous dit qu’il y a une lumière de la Croix : « Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir » (Jn 12,33).

Saint Paul nous rappelle que « la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous, alors que nous étions encore pécheurs » (Rm 5, 8). Saint Jean fonde la possibilité d’aimer Dieu et d’aimer les autres sur le fait même de l’Amour de Dieu qui se donne à nous en prenant l’initiative : « Quant à nous, nous aimons parce que Dieu lui-même nous a aimés le premier » (1Jn 4, 19).

Autant on ne peut parler de la Croix sans parler de la puissance de la Résurrection, on ne peut parler de la Résurrection sans parler de la puissance de la Croix.

Le signe de la Croix nous invite à mettre notre vie sous le signe de la rencontre avec Dieu et avec les autres par Jésus-Christ et dans l’Esprit Saint. Découvrir l’Amour de la Sainte Trinité et la richesse de la Miséricorde divine, c’est être appelé à une foi confiante qui, s’appuyant sur la grâce divine, se veut amour de Dieu et amour universel.

En cette fête de la Croix Glorieuse, gardons notre regard fixé sur Jésus-Christ : « Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix. C’est pourquoi Dieu l’a exalté : il l’a doté du Nom qui est au-dessus de tout nom » (Ph 2, 8-9).

Dans nos maisons, mettons un crucifix : le regarder c’est déjà prier. Dans nos églises et chapelles mettons un crucifix facile à voir : c’est déjà annoncer Jésus-Christ.

Parler d’un crucifix c’est parler d’une croix avec un « corpus » de Jésus mourant sur la croix, car la résurrection ne fait pas de la crucifixion un événement passé et dépassé. Au contraire, la puissance de la résurrection fait de la Croix un événement qui transcende le temps et l’espace. Aujourd’hui-même, en me tenant devant la croix, je me tiens devant l’Amour de Jésus-Christ qui m’a aimé et qui me communique cet Amour par le don de l’Esprit Saint.

Une croix sans « corpus » vient nous dire que le Crucifié est le Ressuscité. Une croix avec « corpus » vient nous dire que le Ressuscité est le Crucifié et que sa Croix est toujours présente et actuelle. Nous avons besoin de ces deux types de croix.

Dans nos paroisses et dans nos communautés retrouvons-nous pour le chemin de croix, renouvelons la pratique du premier vendredi du mois, unissons-nous dans l’expérience de l’exposition au moins hebdomadaire du Saint-Sacrement, soyons fidèles à l’adoration, redécouvrons la nécessité du Jour du Seigneur et témoignons de Jésus-Christ, Crucifié et Ressuscité, par notre participation à la Messe.

La Croix elle-même nous appelant à l’amour de Dieu, elle nous appelle en même temps à la vie communautaire : « Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres » (Jn 13, 34). Demandons à Dieu la force de quitter nos écrans pour qu’ils demeurent des outils sans devenir un esclavage. Dans nos familles développons la gratuité de l’amour. Dans nos paroisses rassemblons : rencontre personnelle avec Dieu, rencontre ensemble avec Dieu, rencontre les uns avec les autres; unissons prière et partage, vie liturgique et vie communautaire.

Jésus est « … le Chemin, la Vérité et la Vie… » (Jn 14, 6). Marchons à sa suite et imitons-le en faisant de notre vie une vie de service car : « le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie… » (Mt 20-28). Que, sous le signe de la Croix, nos paroisses ouvrent les portes, prient, rassemblent, sortent à la rencontre des autres pour établir des ponts, servir la dignité de tout être humain et la paix.

Cher Peuple de Dieu de l’Archidiocèse de Montréal, « … vous êtes un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple destiné au salut, pour que vous annonciez les merveilles de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière » (1P 2, 9). Grâce à la lumière qui vient de la Croix Glorieuse devenons ensemble, par nos vies personnelles, familiales, communautaires et paroissiales, des témoins de Jésus-Christ, Crucifié et Ressuscité.

Le monde a besoin de découvrir et d’approfondir que Dieu, qui est Bonté et Vérité et Beauté « … a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle » (Jn 3, 16).

Que Dieu « riche en miséricorde » (cf. Eph 2, 4) vous comble de la grâce de salut qui vient à nous par le signe de la Croix, par le Coeur transpercé de Jésus-Christ.

† Christian Lépine
Archevêque de Montréal