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Chicago – L’annonce est arrivée le 11 février à 5 h 25, heure du Centre. Malgré les années écoulées depuis mon départ, de telles grandes nouvelles provenant du pays peuvent encore me réveiller assez brutalement. Le pape François a désigné Mgr Frank Leo, évêque auxiliaire de Montréal pour succéder au cardinal Thomas Collins comme Archevêque de Toronto.

Sourcepar Laura Ieraci, The Catholic Register, le 16 février 2023 (Traduit par l'Archidiocèse de Montréal)

J’étais ravie pour Mgr Leo et pour Toronto, mais à la fois déçue du fait que mon ancienne église à Montréal devait encore une fois faire ses adieux à un autre évêque doué – celui-ci moins de six mois après son ordination. 

Et pourtant, la nouvelle de cette nomination a renouvelé également ma conviction que l’Église de Montréal poursuit toujours le rôle d’Église missionnaire qu’elle détient depuis ses débuts. 

J’ai proposé cette réflexion à Mgr Lépine, qui a souligné la présence à Montréal de missionnaires catholiques dès même la fondation de la ville. Depuis, par conséquent, l’Église d’ici serait imprégnée d’un esprit missionnaire nourri par de nombreuses congrégations religieuses, ainsi que par des milliers de prêtres missionnaires et de religieuses et de religieux, des générations durant. 

 « Cet esprit est dans nos gènes, il fait partie de notre culture locale, dit-il, et en tant que prêtres, cela nous invite à demeurer en tout temps disponibles pour la mission, où que cela puisse nous mener. J’aurais aimé, avoue-t-il en riant, que Mgr Leo puisse rester à Montréal en tant qu’évêque auxiliaire; mais voilà qu’une autre mission l’attend. Je connais Mgr Leo, alors je suis heureux pour l’Église au Canada. Je suis heureux pour le peuple de Dieu à Toronto ». 

L’Archevêque a parlé des liens historiques entre les deux diocèses. 

Natif de Halifax, Mgr Michael Power était prêtre pour le Diocèse de Montréal lorsqu’il a été nommé évêque fondateur du Diocèse de Toronto en 1841. Le cardinal Gerald Emmett Carter, également prêtre montréalais, a servi comme Archevêque de Toronto de 1978 à 1990. 

Mgr Leo devient le troisième prêtre montréalais à être nommé à Toronto. 

« La décision prise par le deuxième évêque de Montréal, Mgr Ignace Bourget, qui a servi de 1840 à 1876, d’aider au financement de la construction de la basilique-cathédrale St. Michael’s à Toronto pendant l’épiscopat de Mgr Power n’est qu’un exemple de plus de ce lien et de cet esprit fraternel qui existent de longue date entre les deux diocèses », explique Mgr Lépine. 

Mgr Lépine, en cherchant à expliquer pourquoi des prêtres de Montréal ont été nommés à servir comme évêques pour d’autres diocèses au Canada, et ce, même plus loin que Toronto, finit par décrire les caractéristiques de son Église : 

« Montréal est un diocèse complexe », explique-t-il. Avec une vision ouverte sur l’extérieur, un regard vers la mission et l’Église universelle, « Montréal, bien qu’une île, n’a jamais été isolée. Elle a toujours été un lieu d’accueil, de solidarité, de liberté et de respect ». Le diocèse a toujours été prêt à donner des prêtres, lorsqu’on le lui demande, afin de combler un besoin dans l’Église. 

Ces derniers temps, les membres du clergé montréalais ayant servi comme évêque à l’extérieur de Montréal incluent Mgr Robert Harris, qui a mené le Diocèse de Saint-Jean au Nouveau-Brunswick après avoir été évêque auxiliaire pour Sault Ste Marie pendant cinq ans, et Mgr Anthony Mancini, Archevêque de Halifax-Yarmouth. Ils ont pris leur retraite en 2019 et 2020, respectivement. 

Avant la nomination de Mgr Leo à Toronto, Mgr Thomas Dowd était le seul prêtre montréalais dirigeant  un diocèse au Canada, hors Québec. Il était évêque auxiliaire de Montréal lorsqu’il a été nommé à la tête du diocèse de Sault Ste Marie en 2020. Mgr Dowd s’est empressé d’ajouter que Mgr Alexander Carter, pasteur pour Sault Ste Marie de 1958 à 1985, avait été lui aussi un prêtre montréalais. 

« Je suis vraiment fier qu’un ‘ti gars de Montréal ait bien réussi », dit Mgr Dowd, âgé de 52 ans, à l’endroit du nouvel archevêque de Toronto. « Je connais Mgr Leo depuis son ordination au diaconat. Il a un an de moins que moi, mais il est entré au séminaire à peu près immédiatement après le cégep. On est amis et collègues depuis ce temps-là ». 

Mgr Dowd énumère les qualités de son ami : « Il est astucieux, très pieux, dédié à la tradition, à l’Église dans son ensemble et à son peuple. Il a acquis une vaste gamme d’expérience, soit en paroisse, en enseignement au séminaire ou au service diplomatique. Il a obtenu son doctorat de sa propre initiative et a servi six ans comme secrétaire-général de la Conférence des évêques catholiques du Canada; et il est quadrilingue ». 

« Que je sache, il n’y a pas d’autre prêtre comme lui au Canada, poursuit-il, certainement une personne, à mon opinion, mise à part par le Seigneur et mise à part pour Toronto ». 

Outre l’évidence que Montréal, en tant que diocèse plutôt grand, offre une riche source de prêtres à considérer comme candidats pour des nominations épiscopales, Mgr Dowd explique qu’il est d’ailleurs plus probable que les prêtres montréalais possèdent les compétences recherchées pour certains milieux pastoraux. 

« Les prêtres de Montréal ont tendance à être bilingues; alors, si ailleurs au Canada il existe des besoins de compétences multilingues ou multiculturelles particulières, il est raisonnable qu’on aille chercher des personnes ayant grandi dans un tel environnement », ajoute-t-il. 

Par ailleurs, les prêtres provenant d’un grand diocèse auront probablement accumulé des expériences de travail plus variées en matière d’administration, ainsi que dans le cadre du séminaire, éléments recherchés normalement auprès d’un candidat à l’épiscopat. 

Historien de l’Église canadienne Mark McGowan considère que l’on ne devrait pas trop attribuer la nomination de Mgr Leo à une habitude historique. Ce serait plutôt « l’expérience pastorale significative » que possède Mgr Leo, à comparer avec l’expérience plus administrative des plus récents évêques de Toronto. 

Mgr Leo, dit l’historien, « sent les moutons, il ressent le peuple, et je pense que c’est cela que le Saint Père désire ». 

« Ses centres d’intérêts en matière de dévotion s’agenceront bien avec plusieurs des communautés catholiques d’ici, qui pratiquent une forte dévotion mariale au sein de leur culture catholique respective », continue-t-il, « ce qui lui permettra de toucher les gens d’une manière tout à fait particulière ». 

Mgr Leo sera le premier archevêque italo-canadien à Toronto : geste de reconnaissance, selon McGowan, envers le multiculturalisme torontois. 

« Il semble s’agir d’un plan : soit de mettre en place un jeune homme dynamique, multilingue et doté d’une expérience pastorale signifiante », dit McGowan. « Mgr Leo apporte à Toronto une gamme de qualifications très distinctives, telles que l’on ne voit pas ici depuis longtemps ».