Palestine: le 75e anniversaire de la Nakba
Montréal
Le souvenir de 1948 s’est manifesté dans les rues de Montréal dimanche et lundi dernier, les 14 et 15 mai. Que s’est-il passé en 1948? L’heureuse naissance de l’État d’Israël… et la malheureuse déportation de Palestiniens : 480 villages rasés, 750 000 personnes déportées. Le mot arabe Nakba désigne cette catastrophe. Outre le rapprochement qu’on peut faire avec le Grand Dérangement de 1755 an Acadie, plusieurs liens existent entre les gens d’ici, de la Palestine et d’Israël.
Au plan politique, les Nations Unies – Canada inclus - ont adopté la solution des deux États. L’État d’Israël est bien constitué; tandis que l’Autorité palestinienne reste précaire à bien des égards. La colonisation grignote le territoire prévu à l’origine pour l’État palestinien. Les allers-retours de citoyens et citoyennes avec ces pays sont nombreux : migrations, pèlerinages, longs séjours.
L’Église a une relation de deux millénaires avec cette contrée qu’on appelle « la Terre Sainte » et avec ses habitants. C’est la terre où Jésus est né, a vécu, est mort et ressuscité! L’Église y est présente depuis sa naissance. Aujourd’hui répartis entre orthodoxes, catholiques de rites orientaux et de rite latin, réformés et évangéliques, les chrétiens y ont une histoire longue et complexe, d’ombres et de lumière! Le Pape François – à l’instar de multitudes - y a fait un pèlerinage du 24 au 26 mai 2014. La semaine dernière, il a reçu le directeur de l’UNRWA. Cette agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens agit comme un État en matière de santé et d’éducation, avec des moyens très limités.
Montréal a une expérience de côtoiement de diverses solitudes… et de rapprochements improbables ailleurs! Des familles juives et palestiniennes peuvent s’y rencontrer dans un espace public partagé, notamment dans les écoles et les arrondissements.
PAJU, palestiniens et juifs unis est né de la rencontre de deux enseignants, Bruce Katz et feu Rezeq Faraj. Avec un groupe solidaire, PAJU a tenu des vigiles hebdomadaires au centre-ville pendant des années pour réclamer justice pour les Palestiniens. Feus Lorraine Guay et Michel Chartrand ont mobilisé les milieux communautaire et syndical. La bienveillance envers la Palestine est bien répandue dans ces milieux et se retrouve à la Coalition pour la justice et la paix en Palestine, au Centre international de solidarité ouvrière, entre autres.
Les Franciscains – bien établis à Montréal - sont toujours responsables de la Custodie de la Terre Sainte. Un franciscain qui a étudié à Montréal, David Grenier, en est membre; il vit en Terre Sainte depuis des années. Le Bienheureux Frédéric Janssoone – le bon père Frédéric (1838-1916) - a inauguré les collectes pour les Lieux saints au Canada. Les commissariats de chaque pays recueillent des fonds chaque année lors de la quête du Vendredi Saint (mais aussi tout au long de l’année). https://www.custodia.org/fr
Des églises orthodoxes et de rites orientaux, maintenant bien implantées à Montréal, sont aussi bien présentes en Terre Sainte : melkites, arméniennes, maronite…
L’Assemblée des Ordinaires catholiques de Terre sainte invite la Coordination des conférences épiscopales en janvier de chaque année à un pèlerinage. En 2016, les évêques canadiens y sont allés et ont publié une déclaration : « Vous n’êtes pas oubliés » https://www.cecc.ca/communique-de-presse/vous-netes-pas-oublies-declaration-de-la-coordination-des-conferences-episcopales-en-soutien-de-leglise-en-terre-sainte/
Plusieurs églises - ainsi que PAJU - participent au mouvement BDS - boycott, désinvestissement, sanctions - pour faire pression sur Israël. L'Église catholique n’y est pas engagée car, sans doute, ses membres sur place pourraient subir des conséquences. Le mouvement BDS est actif au Québec et a récemment interpellé la Caisse de dépôt et de placement au sujet d’un de ses investissements.
L’ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem est bien présent à Montréal. Cette association de fidèles catholiques reconnue par le Saint-Siège œuvre pour aider la communauté chrétienne installée en Terre Sainte, aujourd’hui territoire d’Israël, de Palestine, de Jordanie et de Chypre.
L'Église de Montréal a deux délégués au Dialogue judéo-chrétien de Montréal. Cet organisme organise chaque année plusieurs rencontres sous le signe du respect, de l’écoute mutuelle et du partage de connaissances.
Aide à l'Église en détresse est active en Terre Sainte, puisque l’Église y fait face – selon l’expression des chefs des Églises de Jérusalem – à des « adversités » qui affectent la vie des fidèles en ces temps tumultueux.
Un prêtre de notre diocèse, récemment décédé, Robert Assaly, a œuvré en Terre Sainte avec sa famille. Il était actif au sein de Canadian Friends of Sabeel. Cet organisme a fait le choix de la non-violence active pour marcher vers une paix durable.
L'organisme CNEWA apporte des moyens et du réconfort. Le réseau Caritas - dont fait partie Développement et paix- y est aussi présent; son action s’adresse à tous sans distinction de religion.
Enfin, les Fraternités monastiques de Jérusalem, installées sur le plateau Mont-Royal, ont un lien spirituel avec Jérusalem. Voici un extrait d’un de leurs documents fondateurs auquel chacune et chacune peut d’associer :
« Veille à garder aussi en ton cœur un vrai souci de communion avec tous les fils d’Abraham, juifs et musulmans, qui sont, comme toi, des adorateurs de l’unique Dieu et pour qui Jérusalem est également une Ville sainte. Ne crains pas de prier tout au long de ta vie pour qu’un jour il n’y ait plus qu’un seul troupeau et un seul berger. Et que ce qui fut la grande passion du Christ passionne aussi ta vie monastique ! Pour toi il se consacre lui-même afin que tu sois, toi aussi, consacré en vérité. Seule l’unité des fils de Dieu dira au monde le Mystère du vrai Dieu.
« Jérusalem, bâtie comme une ville
où tout ensemble fait corps,
c’est là que montent les tribus,
les tribus du Seigneur. » (Ps 121)
Les croyants ne sont jamais tant unis que lorsqu’ils sont adorateurs au cœur du même Dieu ; lorsqu’ils se reconnaissent frères parce qu’ils se voient fils du même Père. Garde inlassablement au cœur ce cri de la dernière prière de Jésus faite au milieu de la Ville sainte : « Que tous soient un ! » (Livre de Vie de Jérusalem, § 174)
La fraternité humaine – et celle de la famille d’Abraham – est un horizon stimulant pour l’humanité : ici même, en Palestine et en Israël!
Louise Royer
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