Ajoutons un mot. L’opinion populaire a longtemps répandu l’idée que Mgr Lartigue avait prononcé l’excommunication de certains chefs de la rébellion. Souvent interpellés sur cet acte, pour l’amender, l’annuler, les évêques du Québec ont publié, le 27 mars 1987, sous la signature de leur président, Mgr Jean-Marie Fortier, alors archevêque de Sherbrooke, un document intitulé : Cent cinquantième anniversaire de la Révolte de 1837. Mgr Fortier y écrit ceci : « Les contrevenants n’ont été ni excommuniés ni frappés de quelque censure ecclésiastique que ce soit. »
Ce qui est réel, c’est que Mgr Lartigue n’a pas autorisé les curés à enterrer « dans leurs cimetières bénits les corps de ceux qui étaient morts les armes à la main ». C’était une mesure disciplinaire qui avait cours à l’époque dans un milieu profondément religieux où la désobéissance à l’Église scandalisait ou à tout le moins étonnait. Mgr Fortier note que des descendants des Patriotes demandent que l’on permette l’inhumation des restes des victimes avec leurs propres parents décédés depuis longtemps. Et il conclut : « Il apparaît aux autorités de l’Église de 1987 que cette prière puisse être entendue et exaucée »… les évêques d’aujourd’hui… (estiment) « que Dieu seul a jugé la valeur de leur vie (les Patriotes) et a su apprécier leur engagement. »
Tout cela laisse deviner que l’action pastorale du premier évêque de Montréal s’est achevée dans un climat chargé de souffrance. Il voulut les apaiser en étant présent aux familles éprouvées, en intercédant auprès du pouvoir civil pour adoucir les peines et les duretés de la vie des prisonniers.
Quand Mgr Lartigue mourut à l’Hôtel-Dieu de Montréal, le 19 avril 1840, à l’approche de ses soixante-trois ans, celui « que son pays a successivement applaudi, injurié et béni » reçut une profonde marque d’estime. À ses obsèques célébrées à la nouvelle église Notre-Dame, plus de 10 000 fidèles témoignèrent de leur respect pour leur évêque. Autant furent présents, le lendemain à la cathédrale Saint-Jacques pour s’unir à l’hommage que Mgr Ignace Bourget, devenu coadjuteur, rendit au premier évêque de Montréal.