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Benoît XVI laisse une vision claire de l'Église

À plusieurs reprises au cours des dernières semaines de son pontificat, le pape Benoît XVI a exposé sa vision de l'Église et offert des indications subtiles quant à la direction à suivre pour l'avenir.

Sa perspective de l'Église et de ses besoins constitue un des principaux thèmes abordés dans ses discours depuis l'annonce de sa renonciation, soit du 11 au 28 février 2013. Ils semblent tous indiquer la nécessité d'une Église humble.

Sa renonciation, qu'il soutient avoir décidée « pour le bien de l'Église », a semblé préparer le terrain pour les commentaires qui l'ont suivie.

« La foi exige parfois que nous fassions des choix difficiles », a-t-il dit à la foule réunie pour écouter sa dernière audience générale le 27 février 2013. Et ces décisions doivent être prises pour le bien de l'Église et des fidèles.

LE CHRIST EST LA TÊTE

Bien que concrètement elle soit administrée par des personnes humaines, l'Église est du Christ et il en est sa tête. L'Église, a-t-il rappelé à plusieurs occasions et en particulier en annonçant qu'il renonçait au ministère pétrinien, « appartient au Christ, qui ne cessera jamais de la guider et d'en prendre soin » (audience générale du 13 février 2013).

L'Église ne dépend pas exclusivement du travail des hommes et des femmes. Elle n'est pas une organisation humaine ; elle a été instituée par le Christ pour suivre le Christ. C'est Jésus qui veille à ce qu'il y ait des personnes présentes pour accomplir le travail de l'Église, a-t-il rappelé lors de sa dernière audience générale le 27 février. « Dieu guide son Église, la soutient toujours, aussi et surtout dans les moments difficiles. Ne perdons jamais cette vision de foi », a-t-il ajouté.

UNE NOUVELLE RELATION AVEC LE MONDE

L'Église doit être ouverte au renouvellement du Concile Vatican II et en particulier à un dialogue nouveau avec le monde.

Le pape a rappelé que le Concile Vatican II était venu en réponse à un désir au sein de l'Église pour un renouvellement. L'intention d'alors était de « trouver une nouvelle relation entre l'Église et le monde, pour ouvrir l'avenir de l'humanité, pour ouvrir le vrai progrès », a-t-il dit en s'adressant au clergé de Rome le 14 février 2013.

Les Pères du Concile espéraient « que tout se renouvelle, que vienne vraiment une nouvelle Pentecôte, une nouvelle ère de l'Église, parce que l'Église était encore assez robuste en ce temps-là. (...) Toutefois, on sentait que l'Église (...) semblait plutôt une réalité du passé et non porteuse d'avenir. Et à ce moment-là, nous espérions que cette relation se renouvelle, change ; que l'Église soit de nouveau une force pour demain et une force pour aujourd'hui.

Cependant, le renouveau amené par le Concile n'a pas encore été pleinement compris ni réalisé, remarque-t-il avec regret.

L'ÉGLISE HUMBLE

L'Église doit dépasser l'individualisme et la rivalité pour témoigner d'une véritable communion.

L'Église ayant été instituée par le Christ, ses membres doivent vivre la communion ecclésiale intentionnellement et intensément, avec humilité et vigueur, soutient Benoît XVI.

Dans son homélie du mercredi des cendres, en 2013, le pape a dit que chaque catholique doit « réfléchir sur l'importance du témoignage de foi et de vie chrétienne de chacun d'entre nous et de nos communautés pour exprimer le visage de l'Église et comment ce visage peut être parfois défiguré. »

« Je pense en particulier aux fautes contre l'unité de l'Église, aux divisions dans le corps ecclésial » a-t-il poursuivi. La communion ecclésiale ne peut être vécue que « en surmontant les individualismes et les rivalités, [ce qui] est un signe humble et précieux en direction de ceux qui sont loin de la foi ou indifférents », a-t-il dit.

LES LIENS FAMILIAUX

La relation de l'Église avec les fidèles et celle entre les fidèles eux-mêmes évoquent les liens de la famille. Dans son message du 27 février 2013, il a raconté qu'il a reçu durant son pontificat de nombreuses lettres personnelles de la part de fidèles, des lettres dont le ton et le style l'avaient ému. Elles étaient écrites « simplement et avec leur cœur » (...) avec le sens d'un lien familial très affectueux. »

Il a également confié son affection paternelle pour l'Église et pour tous ses membres. « Je vous ai aimés tous et chacun, sans distinction, avec cette charité pastorale qui est le cœur de tout Pasteur. (...) Chaque jour, j'ai porté chacun de vous dans la prière, avec le cœur d'un père » a-t-il terminé sous les applaudissements.

Ces liens d'affection dans ces lettes, reprend-il, illustre que l'Église n'est « pas une organisation, une association à des fins religieuses ou humanitaires, mais un corps vivant ».

Ce dernier thème, déjà présent dans les écrits précédents de Benoît XVI sur la justice sociale et la charité, est revenu dans son discours du 15 février 2013 aux membres de l'association caritative Pro Petri Sede. L'Église doit s'engager sur la voie de la charité chrétienne qui « ne peut se réduire à un simple humanisme ou à une entreprise de promotion humaine. Toute œuvre de charité authentique est donc une manifestation concrète de l'amour de Dieu pour les hommes. »

UN CORPS « VIVANT » ET DYNAMIQUE

L'Église est un « corps vivant », animé par l'Esprit Saint, comme toute réalité vivante, se développe, mais demeure centrée sur le Christ.

Dès le commencement de sa dernière audience générale le 27 février 2013, Benoît XVI s'est dit « véritablement ému » devant l'affluence de la foule venue si nombreuse pour l'écouter. « Je vois l'Église vivante! » , s'est-il exclamé. Dans sa salutation aux cardinaux présents à Rome le 28 février 2013, il a fait référence à l'audience générale de la veille : « Hier sur la place, nous avons vu l'Église comme corps vivant, animé par l'Esprit Saint et fortifié par Dieu. Vivant dans le monde, elle n'est pas du monde, mais de Dieu, du Christ et de l'Esprit. »

Il a également cité le théologien Romano Guardini, dont les écrits ont inspiré sa vision ecclésiologique. « L'Église n'est pas une institution inventée, mais une réalité vive », écrit Guardini. Elle vit au long des siècles et grandit comme tout être vivant en se transformant tout en restant elle-même, car son coeur vivant est le Christ. »

DANS LA CONTINUITÉ DES APÔTRES

La direction de l'Église n'est pas affaire de pouvoir. Il s'agit de guider les fidèles dans la tradition des douze apôtres dans le corps de l'Église.

Dans la structure ecclésiale, la compréhension de la notion de collégialité parmi les évêques a besoin d'être approfondie. Benoît XVI soutient que cette discussion durant le Concile a été mal comprise, perçue comme « une lutte de pouvoir ».

« Il n'est pas question de pouvoir », a-t-il clarifié, mais question de complémentarité entre les éléments qui composent le corps de l'Église.

« Les évêques pris ensemble sont la continuité des Douze, le corps des Apôtres », a-t-il expliqué. « Nous avons dit : un seul évêque, celui de Rome, est le successeur d'un Apôtre en particulier, soit Pierre. Tous les autres deviennent successeurs des Apôtres, entrant dans le corps qui prolonge le corps des Apôtres. »

ASSUJETTIE À LA PAROLE DE DIEU

L'Église est assujettie à l'autorité des Écritures et doit demeurer en relation étroite avec la Parole de Dieu. « L'Église est sous l'Écriture, elle obéit à la Parole de Dieu, et elle ne situe pas au-dessus de l'Écriture » a-t-il dit au clergé de Rome le 14 février 2013. « Et pourtant, l'Écriture est Écriture seulement parce qu'il y a l'Église vivante, son sujet vivant. »

« Sans le sujet vivant qu'est l'Église, l'Écriture n'est qu'un livre et elle ouvre, s'ouvre à diverses interprétations et elle ne donne pas un ultime éclairage. »

CE « NOUS » QUI S'APPUIE SUR UN « JE »

L'Église n'est pas d'abord une organisation, mais plutôt « elle est la communauté dans laquelle Jésus nous réunit tous ensemble ; la foi est nécessairement ecclésiale » a prêché Benoît XVI dans son homélie pour la messe des Cendres le 13 février 2013.

Dans son allocution au clergé du diocèse de Rome le 14 février 2013, Benoît XVI a décrit l'Église comme le « corps mystique du Christ ». L'Église « est un organisme, une réalité vitale, qui entre dans mon âme, de telle sorte que moi-même, justement avec mon âme croyante, je suis un élément constructif de l'Église comme telle. »

« Nous sommes l'Église, l'Église n'est pas une structure ; nous-mêmes les chrétiens, ensemble, nous sommes tous le Corps vivant de l'Église. »

Ainsi, c'est par l'eucharistie, le Corps et le Sang du Christ, que les croyants forment Église, en plus d'être en communion avec l'épiscopat et le Dieu Un et Trine.

Il a proposé que « l'ecclésiologie de la communion », née du Concile Vatican II, soit davantage développée.