Adieux à Benoît Lacroix, l'humble géant
Montréal
(Présence-info) Personne n'en doutait. L'église du couvent Saint-Albert-le-Grand ne serait jamais assez grande pour accueillir tous les amis du dominicain Benoît Lacroix, décédé la semaine dernière.
Jeudi après-midi, quelque 550 personnes ont finalement pu trouver une place dans l'église conventuelle - et 250 autres ont suivi la célébration dans une salle attenante. Tous voulaient rendre hommage à ce «géant, un homme d'exception, un grand arbre», selon les mots du prieur provincial des dominicains, André Descôteaux, qui a présidé les funérailles.
«Le père Lacroix était un grand arbre dont la cime n'a cessé de nous élever vers le beau, le vrai, le bien, vers le Très-Haut», a-t-il ajouté. «Un arbre qui, durant toute sa vie, n'a cessé d'étendre son réseau de radicelles pour rester proche de ce qui se pensait et se créait dans notre monde et notre Église.»
Le dominicain Benoît Lacroix est décédé dans la nuit du 1er au 2 mars des suites d'une pneumonie. Le religieux avait fêté son 100e anniversaire l'automne dernier.
Lors d'hommages faits au début de la célébration, l'historien Guy Laperrière, qui a étudié puis travaillé auprès du dominicain, a souligné que le religieux entretenait des liens d'amitié avec un grand nombre de personnes. Il a ajouté, sous les applaudissements et les rires, que «le père Lacroix avait avec les femmes une relation qui dépassait de loin ce que tous les 8 mars réunis peuvent célébrer». À la fois un homme discret et public, il était toujours attentif aux personnes et menait tous ses projets avec «humour, simplicité et finesse».
«C'est comme si votre absence était impensable. À force d'être hors du temps, je vous ai rêvé immortel. Et aujourd'hui, entouré de votre communauté, de vos amis, et de tous ceux et celles qui se sentent orphelins, je dois me rendre à l'évidence. Vous êtes bel et bien parti pour un très long voyage. Vous étiez prêt», a dit la comédienne Sophie Faucher, une amie du dominicain. «Pas nous», a-t-elle faiblement ajouté, la voix brisée par l'émotion.
«Il aimait énormément les jeunes et les étudiants», a dit Sabrina Di Matteo, la directrice du Centre étudiant Benoît-Lacroix, un service de pastorale universitaire fondé il y a 30 ans. Elle souligne que le père Lacroix, qui s'informait régulièrement des activités proposées par le centre qui portait son propre nom, répétait que «le Christ n'était pas que dans les tabernacles et les églises, mais partout dans la rue, dans les maisons, chez les grands, les petits, les riches et les pauvres».
À la fin de la célébration, on a remis à chacune des personnes présentes une brochure souvenir qui contient une allocution prononcée par le père Lacroix lors d'un déjeuner de la prière en novembre 1990, il y a 25 ans. Les derniers mots de cette allocution ont été lus de nouveau hier après-midi lors des funérailles.
«Après 50 ans de vie sacerdotale, à quoi pense un prêtre?», demandait alors le père Lacroix. «Il pense bien sûr à tout ce qu'il vous a dit. Il pense à la brièveté de la vie, sans être tellement attaché à cette vie qu'il aime beaucoup. Il s'ennuie toujours de ses parents et amis défunts. Il regarde venir sa mort en misant doucement mais totalement sur la miséricorde de Dieu, non sans crainte normale du mystère de l'au-delà.»
La journaliste et auteure Hélène Pelletier-Baillargeon, rencontrée après les funérailles, rappelle que le père Lacroix a été un collaborateur régulier auprès de la revue dominicaine Maintenant, une publication qu'elle a dirigée et qui est disparue en 1974. C'est «une amitié de 50 ans» qu'elle a entretenue avec le dominicain. Elle raconte que le religieux avait un humour inaltérable. «Comme j'étais à l'époque la seule femme au comité de rédaction, il m'avait baptisée madame de Maintenant».
Le père Lacroix, «c'est l'évangile ambulant», dit-elle.
Lire l'homélie du prieur provincial des dominicains, André Descôteaux
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