Montréal

Avez-vous déjà imaginé cela? Être toujours à l’école sans jamais obtenir de diplôme? Et oui, disons que c’est un peu cela ma vie. Il y a 10 ans, dans un désir de répondre à l’appel du Seigneur et de répondre amour pour amour, j’ai tout quitté : père, mère, sœurs, amis, travail pour plonger dans un univers jusque-là inconnu. Embrasser la vie consacrée et surtout la vie monastique n’était certainement pas dans l’air du temps.

Lorsqu’on entre en communauté à 28 ans, on y arrive quand même avec un certain bagage, une certaine expérience de vie ne serait-ce qu’au niveau professionnel. Je me suis très vite rendu compte que malgré mon désir d’avancer en eaux profondes, j’atterrissais dans un univers ayant des repères différents. Et là, tout d’un coup, je faisais face à une violente réalité : une grande partie de ce que j’apportais ne servait pas. Il fallait vraiment et véritablement entrer dans une nouvelle dynamique d’enfantement que la volonté seule ne pouvait garantir si elle n’était pas aidée de la grâce.

Bien entendu, la marche à la suite du Christ est un programme de toute une vie. Personne ne peut dire lui être devenu pleinement conforme. Travailler de ses mains, cultiver la fraternité, vivre l’amour, se nourrir de la Parole de Dieu, dans le service et l’obéissance les uns aux autres, c’est concrétiser dans la vie quotidienne la vie même du Christ.

Chemin d’apprentissage et de conversion à la fois rude et plein de joie. Joie du silence et de la solitude remplis de Sa Présence ; joie de Sa Parole méditée et partagée ; joie de la prière liturgique chantée au quotidien ; joie de vivre en solidarité avec les citadins au cœur de la ville ; joie des rencontres, etc.…

C’est une école à vie, mais pour la vie puisqu’au final, il s’agit de vivre l’Évangile dans une vie ordinaire, tendue vers un horizon, celui de la Rencontre vivifiante avec le Seigneur. La chasteté, la pauvreté, l’obéissance n’ont de sens que dans la seule perspective de cette Rencontre. C’est ma joie! Vivre simplement dans la fraternité avec d’autres pour attendre ensemble comme le veilleur qui guette l’Aurore les pas du Bien-Aimé qui se plaît à prendre différents atours.

Lorsqu’il a institué la fête du 2 février — Présentation du Seigneur au Temple —, comme la fête de la Vie consacrée, le saint pape Jean-Paul II souhaitait premièrement en faire une journée d’action de grâces. Alors, comment ne pas joindre ma voix à celle de l’Église pour rendre grâce au Seigneur pour la vie consacrée qui s’enracine intimement dans la consécration baptismale et qui promeut une dynamique évangélique dans une démarche de conversion permanente.

Oui, je bénis et rends grâce au Seigneur pour son appel qui a trouvé écho dans le cœur de beaucoup de personnes au fil des siècles. Aujourd’hui encore, il ne cesse d’appeler des hommes et des femmes à prolonger par leur vie Sa Présence au cœur du monde.

Le vieillissement et la décroissance liée à la crise des vocations sont bien une réalité qui frappe plusieurs communautés, mais le « Oui » prononcé un jour et attesté chaque jour est toujours porteur de fécondité même dans une situation de pauvreté. C’est une école qui porte et donne toujours la Vie.

Que l’Esprit-Saint renouvelle en chaque baptisé la conscience de cet appel commun à la Sainteté et qu’il donne le courage et le désir à chacun de savoir répondre à l’appel personnel qu’il lui adresse dans le secret de son cœur, avec générosité, dans l’amour et la confiance.


Sœur Arlette (Fraternités Monastiques de Jérusalem)