Pape en Colombie : La haine n'a pas le dernier mot
Pape François
En voyage apostolique en Colombie, le pape François a participé ce vendredi à une rencontre pour la réconciliation nationale, en présence de 6000 personnes, rassemblées dans une structure de Villavicencio.
L'assistance a écouté les témoignages de 4 personnes, parmi lesquelles un jeune homme et une jeune femme qui avaient été enrôlés au sein des Farc.
Le 4e témoignage, délivré par une femme dont le père, puis le mari, puis deux enfants furent assassinés, a particulièrement bouleversé l'assistance. Longuement applaudie par les participants, dont le Pape lui-même, elle a confié avoir été amenée à soigner, dans des circonstances différentes à plusieurs décennies d'écart, les assassins de son père et de son fils.
Dans son discours, le Pape a salué l'histoire de la Colombie, «marquée par des événements tragiques mais aussi pleine de gestes héroïques de grande humanité et de haute valeur spirituelle, de foi et d'espérance. Je viens ici avec respect et avec la claire conscience, comme Moïse, de fouler une terre sacrée», a lancé le Pape. «Une terre arrosée par le sang de milliers de victimes innocentes et par la douleur déchirante de leurs familles et de leurs proches.»
S'adressant successivement et personnellement à chacun des quatre intervenants, le Pape a montré que les souffrances devaient se transformer «en bénédiction et en capacité de pardon pour briser le cycle de violence qui a prévalu en Colombie». «Seul l'amour libère et construit», a-t-il martelé. S'adressant aux deux anciens membres des Farc, mais aussi au reste de l'assemblée, François a rappelé que tous les acteurs du conflit sont des victimes, même s'il est certain que «dans cette régénération morale et spirituelle de l'agresseur, la justice doit s'accomplir», a précisé le Saint-Père.
«Il semble difficile d'accepter le changement de ceux qui ont fait appel à la violence cruelle pour promouvoir leurs intérêts, pour protéger leurs commerces illicites et s'enrichir, ou pour, hypocritement, prétendre défendre la vie de leurs frères, a reconnu le Pape. C'est certainement un défi pour chacun de nous de croire qu'il puisse y avoir un pas en avant de la part de ceux qui ont infligé des souffrances à des communautés et à un pays tout entier. Même quand perdurent les conflits, la violence ou les sentiments de vengeance, n'empêchons pas la justice et la miséricorde de se rencontrer dans une étreinte que l'histoire de souffrance de la Colombie assumera. Guérissons cette souffrance et accueillons tout être humain qui a commis des délits, les reconnaît, se repent et s'engage à réparer en contribuant à la construction de l'ordre nouveau où brillent la justice et la paix.»
Le Pape a aussi adressé un message à ceux qui semblent douter de ce processus de paix, ont la première mouture avait été rejeté par référendum. «Dans tout ce processus, long, difficile, mais qui donne l'espérance de la réconciliation, il est indispensable aussi d'assumer la vérité, a-t-il précisé. C'est un défi grand mais nécessaire. La vérité est une compagne indissociable de la justice et de la miséricorde. (...) La vérité, c'est de dire aux familles déchirées par la douleur ce qui est arrivé à leurs parents disparus. La vérité, c'est d'avouer ce qui s'est passé avec les plus jeunes enrôlés par les acteurs violents. La vérité, c'est de reconnaître la souffrance des femmes victimes de violence et d'abus», a précisé François.
Le Pape a conclu par une prière devant le Crucifié de Bojaya, une localité colombienne où plusieurs dizaines de personnes, réfugiées dans une église, furent massacrées le 2 mai 2002. «Voir le Christ ainsi, mutilé et blessé, nous interpelle. Il n'a plus de bras et il n'a plus de corps, mais il a encore son visage qui nous regarde et qui nous aime. Le Christ brisé et amputé est pour nous encore "davantage le Christ", parce qu'il nous montre, une fois de plus, qu'il est venu pour souffrir pour son peuple et avec son peuple ; et pour nous apprendre aussi que la haine n'a pas le dernier mot, que l'amour est plus fort que la mort et la violence», a insisté le Pape François. Il a ensuite invité toute l'assemblée à réciter avec lui la prière de Saint François d'Assise.
En conclusion, deux petits garçons et deux petites filles ont remercié le Pape, au nom des nouvelles générations de la Colombie, lui faisant bénir un petit arbuste, qui sera planté en signe d'espérance et de confiance en l'avenir.
Lire le discours intégral du Pape
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