Montréal

Le clergé en général, et les prêtres catholiques en particulier, seraient parmi les groupes les plus heureux lorsqu’il s'agit de satisfaction personnelle concernant leur vie et leur ministère, selon Mgr Rossetti.

Que font habituellement les prêtres quand ils se rassemblent? Ils se plaignent, bien sûr, dit Mgr. Stephen Rossetti, mais ça ne veut pas dire qu'ils sont mécontents! "C'est quand les troupes cessent de se plaindre que vous devez vous inquiéter", a déclaré l'ancien officier des renseignements de l'U.S. Air Force.

En fait, le clergé en général, et les prêtres catholiques en particulier, sont parmi les groupes les plus heureux, surtout aux États-Unis. Les prêtres et les ministres rapportent le plus haut niveau de satisfaction personnelle dans leur vie et leur ministère selon plusieurs études, y compris un sondage historique sur 2482 prêtres, réalisé en 2009 par Rossetti.

Ces résultats vont à l'encontre de cette fausse idée croissante selon laquelle les prêtres sont isolés, exténués et malheureux, observe Rossetti.

Le prêtre diocésain de Syracuse et psychologue diplômé était de passage dans le diocèse le jeudi 26 octobre dernier pour présenter les résultats de ses découvertes et discuter d'un programme de développement psycho-spirituel devant plus de 100 prêtres et séminaristes montréalais.  

Tenue au Grand Séminaire de Montréal en présence de l'Archevêque, cette conférence s'est concentrée sur la prêtrise aujourd'hui, ses joies et ses défis. Le bureau du personnel pastoral qui était l'organisateur de la conférence s'est assuré de la disponibilité d'une traduction simultanée de la présentation faite en anglais.

Sondage sur les prêtres

Mgr Rossetti, 66 ans, est l'ancien directeur du St. Luke Institute, un centre d'accompagnement pour prêtres et religieux situé dans le Maryland. Ayant travaillé pendant 18 ans avec des personnes aux prises avec de graves problèmes de santé mentale au plus fort de la crise des abus sexuels dans l'Église, son objectif était d'étudier le niveau global de santé psycho-spirituelle au sein du clergé.

Un sondage de six pages - comprenant des tests psychologiques standards, des échelles de satisfaction, des pratiques spirituelles et des expériences sur l'enfance et le développement - a été envoyé à plus de 4 300 prêtres dans 23 diocèses; 57% y ont répondu.

L'enquête a révélé que 92% des répondants « rapportent un degré de bonheur exceptionnellement élevé en tant que prêtre puis dans leur vie personnelle ».

"Nous faisons référence à la joie intérieure que le Seigneur nous donne", explique Rossetti. "Nous avons de bons jours, de mauvais jours, mais il reste cette joie intérieure qui est un signe de la présence de Dieu en nous".

Des études similaires confirment ces résultats, a souligné le conférencier lors de sa présentation. Une enquête menée au Royaume-Uni auprès de 274 professions/métiers, a révélé que le clergé avait le niveau de satisfaction au travail le plus élevé, même s'il avait l'un des revenus les plus bas. De même, un sondage effectué en 2006 par le National Opinion Research Center des États-Unis a également révélé que les membres du clergé affichaient le plus haut niveau de satisfaction au travail (87%) et le plus haut niveau de bonheur général parmi tous les groupes.

Selon l'enquête de Mgr Rossetti, les principaux indices du « bonheur » comprennent : un sentiment de paix intérieure, une relation forte avec Dieu, une vision positive du célibat, un sentiment d'appréciation de la part des autres ainsi que la présence d'amis proches.

Lorsque le facteur « bonheur » a été analysé pour voir quelles variables étaient associées au sentiment d'accomplissement des prêtres, les résultats montraient systématiquement les mêmes éléments au travail.

Les prêtres qui tombaient dans la catégorie des « heureux » déclaraient aussi avoir des amis proches, priaient plus d'une heure par jour et se confessaient fréquemment. Inversement, ceux qui avaient peu ou pas d'amis proches, priaient moins de 15  minutes par jour et se rendaient rarement à la confession, obtenaient généralement des niveaux plus bas de bonheur, ainsi que des niveaux plus élevés d'épuisement émotionnel et de solitude.

Suite à cette enquête indiquant qu'une vie spirituelle forte est à l'œuvre chez ceux qui ont obtenu des scores élevés dans les échelles de bonheur personnel et d'accomplissement, Mgr Rossetti a utilisé ces variables pour formuler un programme de sainteté en 10 étapes. Ces étapes comprennent : cesser tout péché grave, aller fréquemment à la confession (un bon confesseur est un bon pénitent), prier davantage, développer une spiritualité eucharistique plus profonde et nourrir de bonnes amitiés.

"En général, ma mission est d'aider les prêtres à mener une vie heureuse et sainte", dit-il. «Nous [les prêtres] avons aussi notre part de problèmes de santé mentale», note-t-il, mais selon l'enquête « pas plus que ce que nous trouvons dans la population générale ».

« Heureux », mais surchargés

Les prêtres montréalais ont répondu positivement à la présentation du conférencier, et plusieurs se sont ralliés aux deux propositions faites par leurs collègues qui ont demandé à Mgr Rossetti d'ajouter une 11e étape à la voie de la sainteté (avoir un directeur spirituel compétent) et de reconnaître que l'augmentation de la charge de travail des prêtres est un défi urgent qui doit être pris en compte.

"C'est un énorme problème", a admis Mgr Rossetti. "Nous demandons à nos prêtres de faire plus, mais nous ne changeons pas assez vite nos structures", a-t-il noté.

Rencontré par la suite, l'abbé Francesco Giordano est aussi d'avis que la charge de travail écrasante est une source de préoccupation. "Si cette charge n'est pas bien organisée, elle peut effectivement être dommageable", a noté le vice-chancelier du diocèse.

Ordonné en 2008, l'abbé Giordano a qualifié la présentation d'encourageante. Tout ce que cet homme de 45 ans a entendu "était une réaffirmation des principes qui nous ont été présentés dans notre formation et notre enseignement au séminaire." En tant qu'ancien ingénieur mécanicien, je cherche ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. » Le vice-chancelier a particulièrement apprécié la confirmation des principes enseignés par le séminaire par les statistiques du sondage de Mgr Rossetti.

L'abbé Giordano remarque à la fois que le taux de bonheur de 90% semble élevé et que le terme « bonheur » pouvait être subjectif. " Je dirais que la plupart des prêtres que je connais sont contents ", souligne le vice-chancelier. " Cela ne signifie pas pour autant que nous sommes à l'abri de tous les problèmes et défis de la vie, mais je crois que notre formation nous donne les bases pour relever ces défis. "

« Plus vous êtes loin du Christ, moins vous êtes heureux; plus vous vous identifiez au Christ, plus vous éprouvez un sentiment de satisfaction », a-t-il conclu, faisant écho aux résultats des recherches de Mgr Rossetti.